L’ordre et le désordre

Dans le monde réel, il n’y a jamais de solution, car il n’y a pas de problème (les problèmes sont formés dans notre esprit), il n’y a que des forces de désorganisation (entropie[1]) et l’émergence d’organisations (néguentropie[2]).

Tableau de Pierre Lussier

Les forces sont par essence entropiques, on dirait des bombes, beaucoup d’énergie en peu de temps, peu d’intelligence et pas de conscience. Une structure très hiérarchisée ou peu de personnes pensent pour beaucoup d’exécutants est très peu intelligente (elle n’additionne pas les intelligences, elle les inhibe). Une structure aveugle sur ses conséquences n’utilise pas le « voir » de la conscience. Elle utilise le maximum d’énergie pour reproduire toujours les mêmes biens, les mêmes services, les mêmes comportements.

Pour faire émerger un système organique, il faut beaucoup de conscience, des intelligences qui travaillent ensemble, une conscience qui voit ce qu’elle fait et un faible flux d’énergie constant. Une organisation très participative, où les finalités sont réfléchies pour entrer en harmonie avec l’environnement complexe de la nature et de la société humaine, émerge de relations adaptatives, par exemple, une ferme collective qui fait des jardins écologiques, une association de citoyens pour la participation de tous à la vie municipale…. 

À cet égard, il y a deux sortes d’ordre :

  1. L’ordre planifié policier : des structures et des plans définis par peu de personnes où tout est prévu, prédéfini et exécuté comme des programmes. Ce genre d’ordre est « forcé » par lois, règlements, programmation, bureaucratie, sanctions… Plus une société s’oriente vers ce type d’ordre, plus elle se dirige vers l’éclatement, c’est-à-dire le désordre : les polarisations, les divisions, les confrontations violentes, les soulèvements… Plus elle retarde ce désordre, plus il sera explosif. 
  2. L’ordre organique : il émerge d’un système où chaque élément voit, juge, agit en fonction d’une finalité qui s’adapte à l’environnement à mesure que l’intelligence collective voit et agit. C’est ce type d’ordre qui préside à la vie. On le retrouve dans des mouvements agiles d’intelligences collectives et créatrices.

Même se le premier est nécessaire, c’est ce deuxième type d’ordre qu’il nous faut pour rendre viable les sociétés humaines qui ne peuvent échapper au monde de la vie, la nature. Ce type d’ordre ne peut émerger que d’une solidarité de consciences. L’ordre planifié et programmé, l’ordre reproducteur du même et donc conservateur est généralisé dans nos sociétés, aussi nos sociétés évoluent vers le désordre organique et adaptatif. Saint-Exupéry entend par démocratie : une manière de vivre qui utilise les capacités créatrices de chaque être humain au service d’un dessein commun qui sollicite notre intervention continue.


[1] Entropie : loi physique qui précise que toute dépense d’énergie diminue la complexité, par exemple une bombe, c’est beaucoup d’énergie et peu d’intelligence, son effet : désorganisation, destruction, mort des organismes complexes comme les êtres vivants.

[2] Néguentropie : le contraire de l’entropie, c’est-à-dire la complexification. La complexification demande un flux d’énergie stable, doux et continue, comme par exemple les rayons solaires, alors les molécules se complexifient et peuvent arriver à former des êtres vivants. L’intelligence adaptative augmente.

Une réflexion sur “L’ordre et le désordre

  1. Ce texte bref m’éclaire énormément, tout comme les autres textes de ce blog qui concerne Gaza et l’Ukraine.
    Merci de nous aider à réfléchir.

    Je ne sais pas si j’ai besoin de trouver le sens de ce qui se passe (c’est-à-dire, dans mon esprit, la finalité vers laquelle tendraient ces événements), mais j’ai besoin de comprendre. Qui sommes-nous donc pour commettre de tels actes ou pour les laisser se perpétuer sans hurler notre indignation de par les rues?

    Partout, je lis que la guerre est là depuis toujours et qu’elle est là pour l’éternité, que c’est ainsi, qu’il n’y a rien à faire mais juste à l’accepter. J’ai même lu dans un article que la guerre est parfois nécessaire mais que l’on doit respecter les règles, comme dans un jeu. Ce serait donc tricher que de tuer les civils. Mais la guerre n’est ni un jeu, ni naturelle. Elle fait partie de ces construits que l’on entretient parce qu’ils avantagent certains au détriment des autres. La guerre s’inscrit dans une dynamique de pouvoir et de quête de richesses lesquelles deviennent les piliers sacrés de ce pouvoir.

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