Prodémocratie en Chine

La Charte 08 se présente sous forme d’un manifeste prodémocratique publié le 10 décembre 2008 en Chine. Elle est écrite principalement par Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix (2010). Son préambule s’énonce comme suit : « Cette année est celle du centenaire de la constitution chinoise, elle est également le soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de la personne […]. Après avoir fait la longue expérience d’une situation désastreuse en matière de droits de la personne […], le peuple chinois se rend compte plus clairement chaque jour que la liberté, l’égalité et les droits de la personne sont des valeurs universelles de l’humanité ; et que la démocratie, la république et un gouvernement constitutionnel sont le cadre fondamental d’un système politique moderne. Une « modernisation » qui s’éloigne de ces principes universels et de ces éléments fondamentaux revient à dépouiller les gens de leurs droits, à dégrader les rapports humains, à supprimer la digne lutte des êtres humains contre le malheur. […] C’est un choix qu’on ne peut ne pas faire. »

 

La démocratie exige au minimum : la séparation des pouvoirs, dont l’indépendance judiciaire; une fonction publique répondant aux citoyens; une charte des droits de la personne et de leur égalité; la liberté d’association, de rassemblement et de manifestation; la liberté de religion et de croyance ; l’éducation indépendante de l’État et accessible; la protection de la propriété privée; une fiscalité juste et redistributive; la sécurité sociale; la protection de l’environnement.

Né en 1955, lors des manifestations de la place Tian’anmen en 1989, Liu Xiaobo assure une médiation entre les étudiants et l’armée. Il est immédiatement emprisonné pour plus de deux ans. Une fois libre, il préside le Centre chinois indépendant. Il écrit l’essentiel de la Charte 08. Il est condamné à onze ans de prison dans des conditions cruelles. En 2010, il reçoit le prix Nobel de la paix. Aucun représentant n’est autorisé à recevoir le prix en son nom. En juin 2017, toujours en détention, il est transféré dans un hôpital où il meurt un mois plus tard d’un cancer du foie. En chine, le quotidien d’État Global Times rappelle qu’il a été emprisonné pour avoir «tenté de renverser le gouvernement» et qu’il a « reçu les meilleurs soins possibles ». Sur Weibo (principal média social chinois), on ne peut écrire son nom, on utilise le mot-clé «R.I.P» (rest in peace), on peut lire ce commentaire d’une jeune femme : «Je suis si triste, j’ai lu ses déclarations quand j’étais jeune. J’étais si naïve, je me mentais à moi-même en pensant qu’un jour notre pays allait changer». Les commentaires sont effacés rapidement.

Liu Xiaobo a montré sa détermination jusqu’à la fin. Son épouse, Liu Xia, est placée en résidence surveillée depuis 2010 sans raison légale, elle n’a jamais pu vérifier aucune information à propos de son mari. En refusant de le transférer à l’étranger, en refusant les demandes de sa famille, en ignorant les appels de la communauté internationale, Pékin s’est montré impitoyable jusqu’au bout. Liu Xiaobo est mort comme un criminel en Chine.

Il est la preuve que l’être humain peut refuser la soumission. Un qui marche sur la route de la viabilité est plus fort que mille qui imposent l’inviable.

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